Ancienne Sim au Wat Klang khokkho (Yangtalat - Kalasin) :
Nous vous avons parlé de ces chapelles d’ordination (อุโบสถ – Ubosot - โบสถ์ – Bot – สิม - Sim en Isan et au Laos) à l’architecture particulières à l’Isan (1). Nous vous avons également parlé des « bornes sacrées » qui les cernent aux huit points cardinaux (2). Ces chapelles ne sont pas spécifiques (en dehors de leur architecture et de leurs bornes) au Nord-est puisque nous les retrouvons dans tous les temples du pays. Un très bel article assorti de nombreuses références (3) leur a été consacré par Pierre Pichard (4). Mais nous préférons utiliser le terme de « chapelle » à la connotation plus religieuse que celui de « hall d’ordination » ou plus encore que celui de « salle capitulaire » qui sent par trop son monastère cistercien (5). Pour cet érudit, cette chapelle est devenue le « bâtiment majeur » des monastères, abritant la statue la plus vénérée de Bouddha alors que ce rôle éminent appartenait antérieurement aux Chédi ou aux Stupas abritant originellement une relique de Bouddha (6).
Reliques du Bouddha offertes par la Thaïlande à la France le 17 mai 2009 :
La raison nous en semble de bon sens : Il est très certainement au XXIème siècle plus ardu de bénéficier d’une relique authentifiée de Bouddha qu’aux premiers siècles de l’expansion du bouddhisme (7). Pour Pichard au XIVème siècle, à l’époque de Sukhothai, les monastères étaient centrés sur un stupa et la salle principale, salle de prêche et de prière, le Vihan (วิหาร). La chapelle d'ordination déjà est toujours reconnaissable à son entourage de bornes rituelles (bai sema) qui la distingue du Vihan, était située sur le côté dans l’enceinte du temple. Il en était de même, continue-t-il, à l’époque d’Ayuthaya, fondée en 1351 et rasée par les Birmans en 1767. C’est à la fois l’avènement de la dynastie centralisatrice (tant sur le plan religieux que sur le plan politique) des Chakri et après la fondation de Bangkok en 1782 que la chapelle d'ordination implantée en général au centre d'une enceinte, entourée d’une galerie extérieure, comportant un autel et une statue de Bouddha prit son importance actuelle qui s'est imposée dans le pays au détriment des anciennes variantes architecturales régionales.
La cérémonie de l’ordination Buat ou mieux Buat Phra (บวชพระ) est évidemment tout aussi importante pour les bouddhistes que celle de l’ordination d’un prêtre par l’église catholique et doit respecter une stricte orthodoxie liturgique longuement définie par les canons bouddhistes.
Elle doit en tous cas se dérouler dans une salle spéciale, l’Ubosot dont l’apparence diffère peu de celle du Vihan mais dont les fonctions sont totalement différentes. Si un temple comporte toujours un Vihan, il ne comporte pas toujours un Ubosot dont la construction ne semble pouvoir être autorisée par la hiérarchie qu’au cas où le monastère comporte un certain nombre de moines permanents. Dans tout le pays, ceux que l’on construit au détriment des anciens à l’architecture à la fois plus traditionnelles et plus modestes constituent l’édifice principal, le plus haut, le plus richement décoré de peintures ou de sculptures, mais il faut pour cela que la communauté ait réuni d’importants moyens financiers. Vous le reconnaitrez facilement dans la mesure où il se trouve au centre de l’enceinte sacrée, délimitée par les huit bornes rituelles. C’est la partie visible. Les bornes marquent l’emplacement de leurs « racines », les luknimt (ลูกนิมิตต์ littéralement « boule-signe »).
Ce sont des sphères de pierre enterrées sous elles de quelques dizaines de centimètres de diamètre, elles sont donc huit, une neuvième, également invisible, est enterrée au centre de l’édifice sous le dallage et devant la statue de Bouddha. Elle marque aussi l’endroit ou devra se placer le supérieur devant lequel le postulant doit prononcer ses vœux. Faut-il y voir une invocation aux divinités souterraines infernales pour s’en attirer la protection, les Nagas (นาค) que nous retrouvons souvent dans les corbeaux soutenant la toiture et les acrotères crochues surmontant la toiture ?
C’est par exemple le cas du Vat Phosi (วัดโพธิ์ศรี), « le temple de la sainte illumination » situé dans le district de Khamcha-i (คำชะอี), province de Mukdahan (มุกดาหาร). L’ancien Ubosot a disparu, remplacé par un bâtiment peint d’une couleur agressive, où les spères étaient en avril 2016 encore placées autour du bâtiment en attente de la cérémonie.
Sinon, vous ne pourrez les voir qu’à l’occasion d’une cérémonie inaugurale. Ne revenons pas sur les plus anciennes de ces bornes sacrées (2) dont nous savons que les plus belles et les plus spectaculaires proviennent des sites occupés par les Môns dans l'ancien royaume de Dvaravati, essentiellement dans notre région du Nord-Est.
Bornes dans l'ancinne cité de Fadaetsongyang (Kamalasaï - Kalasin) :
Mais la forme élaborée sous la dynastie Chakri est devenue aujourd'hui un modèle national, la chapelle est un long bâtiment rectangulaire dominé à l'intérieur par la statue de Bouddha, face à l'entrée qui se fait toujours par une extrémité dirigée vers l’Est. Le plus souvent, une ou plusieurs portes s'ouvrent aussi dans le mur Ouest derrière la statue de Bouddha séparée de ce mur par un passage étroit. Ce sont les portes utilisées par les moines lorsqu’ils doivent se rendre dans la chapelle. Telles est la normalisation voulue par Bangkok au détriment des diversités régionales.
Façade ouest de la chapelle d'ordination du Temple du milieu - Huaymek (Kalasin) :
Au Lanna par exemple, dans le Nord-ouest, la chapelle est longtemps restée un bâtiment modeste au côté du vaste et imposant Vihan. Dans nos provinces de l’Isan, la chapelle que nous appelons Sim était également un petit bâtiment simplement construit en briques chaulées de blanc (compte non tenu de celles, peu nombreuses, qui comportent encore les peintures murales) et toujours orientée vers l’Est. Le contraste est frappant avec le modèle de Bangkok. « Mais dans tout le pays, ces chapelles ont été progressivement abandonnées et remplacées dès que possible par un Ubosot neuf plus conforme à la norme de la capitale, une standardisation systématique en parfait accord avec la politique de construction d'une identité nationale poursuivie depuis deux siècles, dans laquelle l'architecture publique, à travers les monastères, les écoles et les bâtiments administratifs des capitales provinciales et des chefs-lieux de district, a joué un rôle aussi évident que le drapeau ou le portrait du roi » (Pichard, note 3). Le contraste est encore plus frappant quand dans l’enceinte du temple subsiste l’ancien Ubosot en pleine déliquescence aux côtés du nouveau construit au début de ce siècle. Dans l’enceinte du Vat klang (วัดกลาง « temple du milieu ») de Huaymek (ห้วยเม็ก) dans la province de Kalasin (กาฬสินธุ์) l’ancienne chapelle datée de 1957 dont les bornes ont disparu, subsiste encore, envahie par les fientes de pigeon aux côtés de la nouvelle qui l’écrase de son luxe un peu tapageur.
Mais il est parfois d’heureuses exceptions, comme dans le petit village de Nonghang (หนองห้าง) près de Kuchinarai (กุฉินารายณ์) dans notre province de Kalasin, où le Sim du temple de Phochaï (วัดโพธ์ชัย) a retrouvé son état d’origine, avec la charpente refaite, toiture en tuiles de bois d’origine et peinture extérieures d’un blanc éclatant.
A ses côtés, la chapelle construite aux normes de Bangkok a piètre allure et les responsables du temple qui nous ont ouvert fort courtoisement les portes de leur chapelle traditionnelle n’ont pas jugé bon de nous ouvrir celles de la chapelle voisine dont les corbeaux et les acrotères de la toiture ne seraient que des moulages !
Que ce soit dans le Lanna ou dans le Nord-est, il est encore fréquent que l’accès à la chapelle soit interdit aux femmes, ce qui ne semble pas – ou plus – être le cas dans le reste du pays. Elles sont en tous cas fermées, sauf exception, en dehors des jours de cérémonies.
Construit-on toujours des temples en Thaïlande ?
Bien sûr ! Dans notre article précédent consacré aux Chédis, nous avons commis une erreur que nos lecteurs voudront bien nous pardonner, en citant le chiffre, en 2016, de 33.902 temples en activité. Il s’agissait du chiffre de l’année 2004. La première colonne indique l’année, la seconde celui du nombre de moines présents (compris novices et temporaires) et la troisième celle du nombre de temples en activité (8) :
2004 341.687 33.902
2005 340.535 34.331
2006 313.267 34.654
2007 328.288 35.271
2008 321.604 35.616
2009 333.876 36.412
2010 349.627 37.075
2011 352.709 37.331
2012 355.295 37.713
En 14 ans, ont donc été construits 3.811 temples et le nombre des moines a été augmenté de 13.608. Si l’on tient compte de tous ceux qui ont rejoint les paradis bouddhistes, il y a donc eu de nombreuses ordinations. Il faut évidemment tenir compte de l’augmentation de la population, un tassement, c’est évident mais il n’est pas certain non plus qu’il y ait véritablement dégringolade comme le constatait Louis Gabaude dans un article qui maintenant 20 ans et qui mériterait peut-être une solide mise à jour ? (9).
Statue d'un Bouddha géant (50 mètres) en cours de construction (2016) au Wat Khao Manarom à Mukdahan
Les constations de Pichard ont été écrites en 2000 sur la base de chiffres dont les derniers dataient de 1997 année au cours de laquelle le nombre de moines était de 270.540. Mais, nous dit-il « près de la moitié des quelque 30.000 monastères actuels ont été construits dans les soixante-dix dernières années, ce qui implique une moyenne de plus de 200 fondations par an, à laquelle il faut ajouter les nombreux Ubosot construits dans les monastères existants pour remplacer le précédent jugé trop petit ou trop vieillot ». Toujours pour l’année 1997, il nous apprend que le bureau des affaires religieuses a reçu 107 demandes d'établissement de monastère, 367 demandes de consécration des bornes d'un nouvel Ubosot, enregistré la fondation de 81 nouveaux monastères et la construction de 95. Ces constructions font l’objet de deux lois de 1902 et de 1941 sur l'organisation de la communauté monastique. Elles affirment qu'il n'appartient qu'au roi d'autoriser un monastère à construire son hall d'ordination : Une demande formelle doit donc être adressée au Département des Affaires religieuses, qui délivre chaque année, au nom du roi, un certain nombre d'autorisations dûment enregistrées dans les archives.
Toujours est-il que nos provinces sont présentement émaillées de ces chapelles d’ordination aux toitures éclatantes en tuiles vernissées montées sur des structures en béton armé, aux décors moulés et aux structures préfabriquées en matière synthétique. Si le prix de la plus sommaire était de 900.000 francs de l’époque (1997), cela correspond - n’importe quel site de calcul de l’inflation vous le dira – à 180.000 euros, soit environ 1.200.000 francs soit encore 7.200.000 baths de ce jour ; un chiffre qu’il faut multiplier par 4 ou 5 pour les plus fastueux. Le financement est assuré par les collectes et les dons des notables qui gagnent ainsi leurs mérites et affichent leur prestige puisque les chapelles mentionnent le nom des donateurs et le montant de leur obole (10).
La contribution de cette famille pour 99.999 baths à la constructions de l'Ubosot du temple du milieu à Huaymek n'est qu'une parmi beaucoup d'autres :
Ce sera alors évidemment à l’occasion d’une fête bouddhiste, celle du nouvel an en général, que les Thaïs quittent leur province d’origine pour rejoindre leur province natale ce qui permettra aux monastères d’organiser leurs grandes et lucratives kermesses annoncée de longue date par les panneaux et les mégaphones tonitruant et que ceux qui ont pu construire un nouvel Ubosot organiseront la cérémonie du dépôt des bornes rituelles pendant ces fêtes. C’est la ngantat louknimit (งานตัดลูกนิมิด littéralement « fête-couper-louknimit »). Les louk nimit avaient évidemment été préparées et alignées devant la chapelle. La cérémonie, à laquelle nous n’avons pas pu assister à ce jour, est longuement décrite par Pichard. Les neuf louk nimit sont installées au-dessus de leur emplacement futur, suspendues à des cordes sous un tréteau. La présence de nombreux moines est indispensable pour assister à leur consécration, ils doivent en effet désacraliser le terrain pour le cas où une enceinte sacrée y aurait été instaurée dans des temps anciens, puisque plusieurs enceintes ne peuvent se recouper ou se superposer sans perdre leur valeur, ce qui invaliderait les futures ordinations. A leur signal enfin, les donateurs laïcs libèrent simultanément à coup de machettes toutes les racines qui tombent dans leur cache. Les bai séma seront installées immédiatement après et les ordinations pourront commencer dès le lendemain.
Mais ces contraintes architecturales tombées de Bangkok sont-elles aussi contraignantes que le signale Pichard ? Nous pouvons citer au moins deux exemples, mais sont-ils des exceptions qui confirment le règle ? Dans l’enceinte du Vat Phutta nimit - Phu Khao (วัดพุทธนิมิด – ภูคาว « le temple de la vision bouddhiste » « la terre du gisant ») dans le district de Sahatsakhan (สหัสขันธ์) dans la province de Kalasin, une somptueuse chapelle d’ordination tout en bois massif a été construite au début de ce siècle sur un site Dvaravati au moyen des bois provenant de l’abattage des forêts lors de la construction du gigantesque lac artificiel de Lampaodam (ลำเปาดำ), les bornes sacrées provenant des temples engloutis sous les eaux.
NOTES
(1) Voir notre article A 196 « LES PEINTURES MURALES, L’ÂME DES TEMPLES DU COEUR DE L’ISAN ».
(2) Voir notre article A 213 « LES ORIGINES MYSTÉRIEUSES DES BORNES SACRÉES (BAÏ SÉMA) DES TEMPLES DE L’ISAN EN THAILANDE ».
(3) P. Pichard « Le hall d'ordination dans le monastère thaï ». In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 87 N°1.
(4) Cet architecte a – notamment – à son actif la restauration du temple khmer de Pimaï.
(5) C’est le terme utilisé par André Bareau (cité par Pichard) un éminent spécialiste français du bouddhisme.
(6) Voir notre article A 214.1 « L’ARCHITECTURE RELIGIEUSE SIAMOISE ET SON HISTOIRE. I - LES « SAINTS CHÉDIS ».
(7) La question des reliques de Bouddha nécessiterait d’écrire une thèse sinon un roman. A sa mort, les populations et les communautés voulurent toutes avoir une part de ses reliques : ses cendres, quelques ossements non consumés et ses objets personnels qui étaient au nombre (évidemment symbolique) de 84.000. Il s'éleva des contestations acharnées ; on échangea des propos chargés de haine, on proféra des menaces de guerre et peu s'en fallut qu'on en vînt aux mains. Mais un brahmane, prévoyant les conséquences de ce conflit, réussit à obtenir le partage des reliques, en leur rappelant qu’il n'était pas convenable qu'ils s'égorgeassent. Elles furent alors divisées en huit parts et diffusées dans tout le monde bouddhiste. Il est probable que celles qui se trouvent au Siam ont été amenées par les moines évangélisateurs venus de Ceylan. Voir par exemple Gilles Banderier, Philippe Borgeaud et Youri Volokhine « Les Objets de la mémoire. Pour une approche comparatiste des reliques et de leur culte » In: Revue belge de philologie et d'histoire, tome 85, fasc. 3-4, 2007pp. 941-942.
(8) Ces chiffres proviennent du site officiel www.dhammathai.org mais nous n’en avons pas trouvé pour les années suivantes.
(9) Louis Gabaude « La triple crise du bouddhisme en Thaïlande (1990-1996) ». In : Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 83, 1996. pp. 241-257.
(10) Nous ne critiquons pas cette façon de faire, il en est de même dans les églises catholiques en Thaïlande, pas de fausse modestie, dans ce pays, on préfère paraître qu’être
Peut-être aussi plus prosaïquement la volonté d’assurer la permanence de l’enceinte au cas où les bornes viendraient à être déplacées ou à disparaître.
C’est par exemple le cas du Vat Phosi (วัดโพธิ์ศรี), « le temple de la sainte illumination » situé dans le district de Khamcha-i (คำชะอี), province de Mukdahan (มุกดาหาร). L’ancien Ubosot a disparu, remplacé par un bâtiment peint d’une couleur agressive, où les bornes étaient en avril 2016 encore placées autour du bâtiment en attente de la cérémonie. Sinon, vous ne pourrez les voir qu’à l’occasion d’une cérémonie inaugurale. Ne revenons pas sur les plus anciennes de ces bornes sacrées (2) dont nous savons que les plus belles et les plus spectaculaires proviennent des sites occupés par les Môns dans l'ancien royaume de Dvaravati, essentiellement dans notre région du Nord-Est.
Mais la forme élaborée sous la dynastie Chakri est devenue aujourd'hui un modèle national, la chapelle est un long bâtiment rectangulaire dominé à l'intérieur par la statue de Bouddha, face à l'entrée qui se fait toujours par une extrémité dirigée vers l’Est. Le plus souvent, une ou plusieurs portes s'ouvrent aussi dans le mur Ouest derrière la statue de Bouddha séparée de ce mur par un passage étroit. Ce sont les portes utilisées par les moines lorsqu’ils doivent se rendre dans la chapelle. Telles est la normalisation voulue par Bangkok au détriment des diversités régionales.
Au Lanna par exemple, dans le Nord-ouest, la chapelle est longtemps restée un bâtiment modeste au côté du vaste et imposant Vihan. Dans nos provinces de l’Isan, la chapelle que nous appelons Sim était également un petit bâtiment simplement construit en briques chaulées de blanc (compte non tenu de celles, peu nombreuses, qui comportent encore les peintures murales) et toujours orientée vers l’Est. Le contraste est frappant avec le modèle de Bangkok. « Mais dans tout le pays, ces chapelles ont été progressivement abandonnées et remplacées dès que possible par un Ubosot neuf plus conforme à la norme de la capitale, une standardisation systématique en parfait accord avec la politique de construction d'une identité nationale poursuivie depuis deux siècles, dans laquelle l'architecture publique, à travers les monastères, les écoles et les bâtiments administratifs des capitales provinciales et des chefs-lieux de district, a joué un rôle aussi évident que le drapeau ou le portrait du roi » (Pichard, note 3). Le contraste est encore plus frappant quand dans l’enceinte du temple subsiste l’ancien Ubosot en pleine déliquescence aux côtés du nouveau construit au début de ce siècle. Dans l’enceinte du Vat klang (วัดกลาง « temple du milieu ») de Huaymek (ห้วยเม็ก) dans la province de Kalasin (กาฬสินธุ์) l’ancienne chapelle datée de 1957 dont les bornes ont disparu, subsiste encore, envahie par les fientes de pigeon aux côtés de la nouvelle qui l’écrase de son luxe tapageur. A quelques kilomètres de Sakon nakhon (สกลนคร) la toiture de la chapelle du Vat Buddha sayaram (วัดพระพุทธไสยาราม สกลนคร), bien que celle d’origine en tuiles de bois ait été remplacée par des tôles ondulées rougeâtres, est en passe de s’effondrer, et il est hasardeux de s’aventurer à l’intérieur. Mais il est parfois d’heureuses exceptions, comme dans le petit village de Nonghang (หนองห้าง) près de Kuchinarai (กุฉินารายณ์) dans notre province de Kalasin, où le Sim du temple de Phochaï (วัดโพธ์ชัย) a retrouvé son état d’origine, avec la charpente refaite, toiture en tuiles de bois d’origine et peinture extérieures d’un blanc éclatant. A ses côtés, la chapelle construite aux normes de Bangkok a piètre allure et les responsables du temple qui nous ont ouvert fort courtoisement les portes de leur chapelle traditionnelle n’ont pas jugé bon de nous ouvrir celles de la chapelle voisine dont les corbeaux et les acrotères de la toiture ne seraient que des moulages !
Que ce soit dans le Lanna ou dans le Nord-est, il est encore fréquent que l’accès à la chapelle soit interdit aux femmes, ce qui ne semble pas – ou plus – être le cas dans le reste du pays. Elles sont en tous cas fermées, sauf exception, en dehors des jours de cérémonies.
Construit-on toujours des temples en Thaïlande ?
Bien sûr ! Dans notre article précédent consacré aux Chédis, nous avons commis une erreur que nos lecteurs voudront bien nous pardonner, en citant le chiffre, en 2016, de 33.902 temples en activité. Il s’agissait du chiffre de l’année 2004. La première colonne indique l’année, la seconde celui du nombre de moines présents (compris novices et temporaires) et la troisième celle du nombre de temples en activité (8) :
2004 341.687 33.902
2005 340.535 34.331
2006 313.267 34.654
2007 328.288 35.271
2008 321.604 35.616
2009 333.876 36.412
2010 349.627 37.075
2011 352.709 37.331
2012 355.295 37.713
En 14 ans, ont donc été construits 3.811 temples et le nombre des moines a été augmenté de 13.608. Si l’on tient compte de tous ceux qui ont rejoint les paradis bouddhistes, il y a donc eu de nombreuses ordinations. Il faut évidemment tenir compte de l’augmentation de la population, un tassement, c’est évident mais il n’est pas certain non plus qu’il y ait véritablement dégringolade comme le constatait Louis Gabaude dans un article qui maintenant 20 ans et qui mériterait peut-être une solide mise à jour ? (9).
Les constations de Pichard ont été écrites en 2000 sur la base de chiffres dont les derniers dataient de 1997 année au cours de laquelle le nombre de moines était de 270.540. Mais, nous dit-il « près de la moitié des quelque 30.000 monastères actuels ont été construits dans les soixante-dix dernières années, ce qui implique une moyenne de plus de 200 fondations par an, à laquelle il faut ajouter les nombreux Ubosot construits dans les monastères existants pour remplacer le précédent jugé trop petit ou trop vieillot ». Toujours pour l’année 1997, il nous apprend que le bureau des affaires religieuses a reçu 107 demandes d'établissement de monastère, 367 demandes de consécration des bornes d'un nouvel Ubosot, enregistré la fondation de 81 nouveaux monastères et la construction de 95. Ces constructions font l’objet de deux lois de 1902 et de 1941 sur l'organisation de la communauté monastique. Elles affirment qu'il n'appartient qu'au roi d'autoriser un monastère à construire son hall d'ordination : Une demande formelle doit donc être adressée au Département des Affaires religieuses, qui délivre chaque année, au nom du roi, un certain nombre d'autorisations dûment enregistrées dans les archives.
Toujours est-il que nos provinces sont présentement émaillées de ces chapelles d’ordination aux toitures éclatantes en tuiles vernissées montées sur des structures en béton armé, aux décors moulés et aux structures préfabriquées en matière synthétique. Si le prix de la plus sommaire était de 900.000 francs de l’époque (1997), cela correspond - n’importe quel site de calcul de l’inflation vous le dira – à 180.000 euros, soit environ 1.200.000 francs soit encore 7.200.000 baths de ce jour ; un chiffre qu’il faut multiplier par 4 ou 5 pour les plus fastueux. Le financement est assuré par les collectes et les dons des notables qui gagnent ainsi leurs mérites et affichent leur prestige puisque les chapelles mentionnent le nom des donateurs et le montant de leur obole (10). Ce sera alors évidemment à l’occasion d’une fête bouddhiste, celle du nouvel an en général, que les Thaïs quittent leur province d’origine pour rejoindre leur province natale ce qui permettra aux monastères d’organiser leurs grandes et lucratives kermesses annoncée de longue date par les panneaux et les mégaphones tonitruant et que ceux qui ont pu construire un nouvel Ubosot organiseront la cérémonie du dépôt des bornes rituelles pendant ces fêtes. C’est la ngantat louknimit (งานตัดลูกนิมิด littéralement « fête-couper-louknimit »). Les louk nimit avaient évidemment été préparées et alignées devant la chapelle. La cérémonie, à laquelle nous n’avons pas pu assister à ce jour, est longuement décrite par Pichard. Les neuf louk nimit sont installées au-dessus de leur emplacement futur, suspendues à des cordes sous un tréteau. La présence de nombreux moines est indispensable pour assister à leur consécration, ils doivent en effet désacraliser le terrain pour le cas où une enceinte sacrée y aurait été instaurée dans des temps anciens, puisque plusieurs enceintes ne peuvent se recouper ou se superposer sans perdre leur valeur, ce qui invaliderait les futures ordinations. A leur signal enfin, les donateurs laïqs libèrent simultanément à coup de machettes toutes les racines qui tombent dans leur cache. Les bai séma seront installées immédiatement après et les ordinations pourront commencer dès le lendemain.
(https://www.youtube.com/watch?v=QlMro8s9ZpE)
Mais ces contraintes architecturales tombées de Bangkok sont-elles aussi contraignantes que le signale Pichard ? Nous pouvons citer au moins deux exemples, mais sont-ils des exceptions qui confirment le règle ? Dans l’enceinte du Vat Phutta nimit - Phu Khao (วัดพุทธนิมิด – ภูคาว « le temple de la vision bouddhiste » « la terre du gisant ») dans le district de Sahatsakhan (สหัสขันธ์) dans la province de Kalasin, une somptueuse chapelle d’ordination tout en bois massif a été construite au début de ce siècle sur un site Dvaravati au moyen des bois provenant de l’abattage des forêts lors de la construction du gigantesque lac artificiel de Lampaodam (ลำเปาดำ), les bornes sacrées provenant des temples engloutis sous les eaux. Le Vat pa anouson (วัด ป่าอนุสรณ์ข : « Temple du mémorial de la forêt ») sous-district de Khammuat kéo (คำเหมือแก้วอ), district de Huaymek (ห้วยเม็ก), province de Kalasin contient une superbe chapelle d’ordination toute en bois massif non encore inaugurée (construction 2015-2016) mais comme son nom l’indique, il est situé dans une épaisse forêt qui semble appartenir au patrimoine du temple.
A suivre ……
NOTES
(1) Voir notre article A 196 « LES PEINTURES MURALES, L’ÂME DES TEMPLES DU COEUR DE L’ISAN ».
(2) Voir notre article A 213 « LES ORIGINES MYSTÉRIEUSES DES BORNES SACRÉES (BAÏ SÉMA) DES TEMPLES DE L’ISAN EN THAILANDE ».
(3) P. Pichard « Le hall d'ordination dans le monastère thaï ». In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 87 N°1.
(4) Cet architecte a – notamment – à son actif la restauration du temple khmer de Pimaï.
(5) C’est le terme utilisé par André Bareau (cité par Pichard) un éminent spécialiste français du bouddhisme.
(6) Voir notre article A 214.1 « L’ARCHITECTURE RELIGIEUSE SIAMOISE ET SON HISTOIRE. I - LES « SAINTS CHÉDIS ».
(7) La question des reliques de Bouddha nécessiterait d’écrire une thèse sinon un roman. A sa mort, les populations et les communautés voulurent toutes avoir une part de ses reliques : ses cendres, quelques ossements non consumés et ses objets personnels qui étaient au nombre (évidemment symbolique) de 84.000. Il s'éleva des contestations acharnées ; on échangea des propos chargés de haine, on proféra des menaces de guerre et peu s'en fallut qu'on en vînt aux mains. Mais un brahmane, prévoyant les conséquences de ce conflit, réussit à obtenir le partage des reliques, en leur rappelant qu’il n'était pas convenable qu'ils s'égorgeassent. Elles furent alors divisées en huit parts et diffusées dans tout le monde bouddhiste. Il est probable que celles qui se trouvent au Siam ont été amenées par les moines évangélisateurs venus de Ceylan. Voir par exemple Gilles Banderier, Philippe Borgeaud et Youri Volokhine « Les Objets de la mémoire. Pour une approche comparatiste des reliques et de leur culte » In: Revue belge de philologie et d'histoire, tome 85, fasc. 3-4, 2007pp. 941-942.
(8) Ces chiffres proviennent du site officiel www.dhammathai.org mais nous n’en avons pas trouvé pour les années suivantes.
(9) Louis Gabaude « La triple crise du bouddhisme en Thaïlande (1990-1996) ». In : Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 83, 1996. pp. 241-257.
(10) Nous ne critiquons pas cette façon de faire, il en est de même dans les églises catholiques en Thaïlande, pas de fausse modestie, dans ce pays, on préfère paraître qu’être.
Peut-être aussi plus prosaïquement la volonté d’assurer la permanence de l’enceinte au cas où les bornes viendraient à être déplacées ou à disparaître.
C’est par exemple le cas du Vat Phosi (วัดโพธิ์ศรี), « le temple de la sainte illumination » situé dans le district de Khamcha-i (คำชะอี), province de Mukdahan (มุกดาหาร). L’ancien Ubosot a disparu, remplacé par un bâtiment peint d’une couleur agressive, où les bornes étaient en avril 2016 encore placées autour du bâtiment en attente de la cérémonie. Sinon, vous ne pourrez les voir qu’à l’occasion d’une cérémonie inaugurale. Ne revenons pas sur les plus anciennes de ces bornes sacrées (2) dont nous savons que les plus belles et les plus spectaculaires proviennent des sites occupés par les Môns dans l'ancien royaume de Dvaravati, essentiellement dans notre région du Nord-Est.
Mais la forme élaborée sous la dynastie Chakri est devenue aujourd'hui un modèle national, la chapelle est un long bâtiment rectangulaire dominé à l'intérieur par la statue de Bouddha, face à l'entrée qui se fait toujours par une extrémité dirigée vers l’Est. Le plus souvent, une ou plusieurs portes s'ouvrent aussi dans le mur Ouest derrière la statue de Bouddha séparée de ce mur par un passage étroit. Ce sont les portes utilisées par les moines lorsqu’ils doivent se rendre dans la chapelle. Telles est la normalisation voulue par Bangkok au détriment des diversités régionales.
Au Lanna par exemple, dans le Nord-ouest, la chapelle est longtemps restée un bâtiment modeste au côté du vaste et imposant Vihan. Dans nos provinces de l’Isan, la chapelle que nous appelons Sim était également un petit bâtiment simplement construit en briques chaulées de blanc (compte non tenu de celles, peu nombreuses, qui comportent encore les peintures murales) et toujours orientée vers l’Est. Le contraste est frappant avec le modèle de Bangkok. « Mais dans tout le pays, ces chapelles ont été progressivement abandonnées et remplacées dès que possible par un Ubosot neuf plus conforme à la norme de la capitale, une standardisation systématique en parfait accord avec la politique de construction d'une identité nationale poursuivie depuis deux siècles, dans laquelle l'architecture publique, à travers les monastères, les écoles et les bâtiments administratifs des capitales provinciales et des chefs-lieux de district, a joué un rôle aussi évident que le drapeau ou le portrait du roi » (Pichard, note 3). Le contraste est encore plus frappant quand dans l’enceinte du temple subsiste l’ancien Ubosot en pleine déliquescence aux côtés du nouveau construit au début de ce siècle. Dans l’enceinte du Vat klang (วัดกลาง « temple du milieu ») de Huaymek (ห้วยเม็ก) dans la province de Kalasin (กาฬสินธุ์) l’ancienne chapelle datée de 1957 dont les bornes ont disparu, subsiste encore, envahie par les fientes de pigeon aux côtés de la nouvelle qui l’écrase de son luxe tapageur. A quelques kilomètres de Sakon nakhon (สกลนคร) la toiture de la chapelle du Vat Buddha sayaram (วัดพระพุทธไสยาราม สกลนคร), bien que celle d’origine en tuiles de bois ait été remplacée par des tôles ondulées rougeâtres, est en passe de s’effondrer, et il est hasardeux de s’aventurer à l’intérieur. Mais il est parfois d’heureuses exceptions, comme dans le petit village de Nonghang (หนองห้าง) près de Kuchinarai (กุฉินารายณ์) dans notre province de Kalasin, où le Sim du temple de Phochaï (วัดโพธ์ชัย) a retrouvé son état d’origine, avec la charpente refaite, toiture en tuiles de bois d’origine et peinture extérieures d’un blanc éclatant. A ses côtés, la chapelle construite aux normes de Bangkok a piètre allure et les responsables du temple qui nous ont ouvert fort courtoisement les portes de leur chapelle traditionnelle n’ont pas jugé bon de nous ouvrir celles de la chapelle voisine dont les corbeaux et les acrotères de la toiture ne seraient que des moulages !
Que ce soit dans le Lanna ou dans le Nord-est, il est encore fréquent que l’accès à la chapelle soit interdit aux femmes, ce qui ne semble pas – ou plus – être le cas dans le reste du pays. Elles sont en tous cas fermées, sauf exception, en dehors des jours de cérémonies.
Construit-on toujours des temples en Thaïlande ?
Bien sûr ! Dans notre article précédent consacré aux Chédis, nous avons commis une erreur que nos lecteurs voudront bien nous pardonner, en citant le chiffre, en 2016, de 33.902 temples en activité. Il s’agissait du chiffre de l’année 2004. La première colonne indique l’année, la seconde celui du nombre de moines présents (compris novices et temporaires) et la troisième celle du nombre de temples en activité (8) :
2004 341.687 33.902
2005 340.535 34.331
2006 313.267 34.654
2007 328.288 35.271
2008 321.604 35.616
2009 333.876 36.412
2010 349.627 37.075
2011 352.709 37.331
2012 355.295 37.713
En 14 ans, ont donc été construits 3.811 temples et le nombre des moines a été augmenté de 13.608. Si l’on tient compte de tous ceux qui ont rejoint les paradis bouddhistes, il y a donc eu de nombreuses ordinations. Il faut évidemment tenir compte de l’augmentation de la population, un tassement, c’est évident mais il n’est pas certain non plus qu’il y ait véritablement dégringolade comme le constatait Louis Gabaude dans un article qui maintenant 20 ans et qui mériterait peut-être une solide mise à jour ? (9).
Les constations de Pichard ont été écrites en 2000 sur la base de chiffres dont les derniers dataient de 1997 année au cours de laquelle le nombre de moines était de 270.540. Mais, nous dit-il « près de la moitié des quelque 30.000 monastères actuels ont été construits dans les soixante-dix dernières années, ce qui implique une moyenne de plus de 200 fondations par an, à laquelle il faut ajouter les nombreux Ubosot construits dans les monastères existants pour remplacer le précédent jugé trop petit ou trop vieillot ». Toujours pour l’année 1997, il nous apprend que le bureau des affaires religieuses a reçu 107 demandes d'établissement de monastère, 367 demandes de consécration des bornes d'un nouvel Ubosot, enregistré la fondation de 81 nouveaux monastères et la construction de 95. Ces constructions font l’objet de deux lois de 1902 et de 1941 sur l'organisation de la communauté monastique. Elles affirment qu'il n'appartient qu'au roi d'autoriser un monastère à construire son hall d'ordination : Une demande formelle doit donc être adressée au Département des Affaires religieuses, qui délivre chaque année, au nom du roi, un certain nombre d'autorisations dûment enregistrées dans les archives.
Toujours est-il que nos provinces sont présentement émaillées de ces chapelles d’ordination aux toitures éclatantes en tuiles vernissées montées sur des structures en béton armé, aux décors moulés et aux structures préfabriquées en matière synthétique. Si le prix de la plus sommaire était de 900.000 francs de l’époque (1997), cela correspond - n’importe quel site de calcul de l’inflation vous le dira – à 180.000 euros, soit environ 1.200.000 francs soit encore 7.200.000 baths de ce jour ; un chiffre qu’il faut multiplier par 4 ou 5 pour les plus fastueux. Le financement est assuré par les collectes et les dons des notables qui gagnent ainsi leurs mérites et affichent leur prestige puisque les chapelles mentionnent le nom des donateurs et le montant de leur obole (10). Ce sera alors évidemment à l’occasion d’une fête bouddhiste, celle du nouvel an en général, que les Thaïs quittent leur province d’origine pour rejoindre leur province natale ce qui permettra aux monastères d’organiser leurs grandes et lucratives kermesses annoncée de longue date par les panneaux et les mégaphones tonitruant et que ceux qui ont pu construire un nouvel Ubosot organiseront la cérémonie du dépôt des bornes rituelles pendant ces fêtes. C’est la ngantat louknimit (งานตัดลูกนิมิด littéralement « fête-couper-louknimit »). Les louk nimit avaient évidemment été préparées et alignées devant la chapelle. La cérémonie, à laquelle nous n’avons pas pu assister à ce jour, est longuement décrite par Pichard. Les neuf louk nimit sont installées au-dessus de leur emplacement futur, suspendues à des cordes sous un tréteau. La présence de nombreux moines est indispensable pour assister à leur consécration, ils doivent en effet désacraliser le terrain pour le cas où une enceinte sacrée y aurait été instaurée dans des temps anciens, puisque plusieurs enceintes ne peuvent se recouper ou se superposer sans perdre leur valeur, ce qui invaliderait les futures ordinations. A leur signal enfin, les donateurs laïqs libèrent simultanément à coup de machettes toutes les racines qui tombent dans leur cache. Les bai séma seront installées immédiatement après et les ordinations pourront commencer dès le lendemain.
(https://www.youtube.com/watch?v=QlMro8s9ZpE)
Mais ces contraintes architecturales tombées de Bangkok sont-elles aussi contraignantes que le signale Pichard ? Nous pouvons citer au moins deux exemples, mais sont-ils des exceptions qui confirment le règle ? Dans l’enceinte du Vat Phutta nimit - Phu Khao (วัดพุทธนิมิด – ภูคาว « le temple de la vision bouddhiste » « la terre du gisant ») dans le district de Sahatsakhan (สหัสขันธ์) dans la province de Kalasin, une somptueuse chapelle d’ordination tout en bois massif a été construite au début de ce siècle sur un site Dvaravati au moyen des bois provenant de l’abattage des forêts lors de la construction du gigantesque lac artificiel de Lampaodam (ลำเปาดำ), les bornes sacrées provenant des temples engloutis sous les eaux. Le Vat pa anouson (วัด ป่าอนุสรณ์ข : « Temple du mémorial de la forêt ») sous-district de Khammuat kéo (คำเหมือแก้วอ), district de Huaymek (ห้วยเม็ก), province de Kalasin contient une superbe chapelle d’ordination toute en bois massif non encore inaugurée (construction 2015-2016) mais comme son nom l’indique, il est situé dans une épaisse forêt qui semble appartenir au patrimoine du temple.
A suivre ……
NOTES
(1) Voir notre article A 196 « LES PEINTURES MURALES, L’ÂME DES TEMPLES DU COEUR DE L’ISAN ».
(2) Voir notre article A 213 « LES ORIGINES MYSTÉRIEUSES DES BORNES SACRÉES (BAÏ SÉMA) DES TEMPLES DE L’ISAN EN THAILANDE ».
(3) P. Pichard « Le hall d'ordination dans le monastère thaï ». In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 87 N°1.
(4) Cet architecte a – notamment – à son actif la restauration du temple khmer de Pimaï.
(5) C’est le terme utilisé par André Bareau (cité par Pichard) un éminent spécialiste français du bouddhisme.
(6) Voir notre article A 214.1 « L’ARCHITECTURE RELIGIEUSE SIAMOISE ET SON HISTOIRE. I - LES « SAINTS CHÉDIS ».
(7) La question des reliques de Bouddha nécessiterait d’écrire une thèse sinon un roman. A sa mort, les populations et les communautés voulurent toutes avoir une part de ses reliques : ses cendres, quelques ossements non consumés et ses objets personnels qui étaient au nombre (évidemment symbolique) de 84.000. Il s'éleva des contestations acharnées ; on échangea des propos chargés de haine, on proféra des menaces de guerre et peu s'en fallut qu'on en vînt aux mains. Mais un brahmane, prévoyant les conséquences de ce conflit, réussit à obtenir le partage des reliques, en leur rappelant qu’il n'était pas convenable qu'ils s'égorgeassent. Elles furent alors divisées en huit parts et diffusées dans tout le monde bouddhiste. Il est probable que celles qui se trouvent au Siam ont été amenées par les moines évangélisateurs venus de Ceylan. Voir par exemple Gilles Banderier, Philippe Borgeaud et Youri Volokhine « Les Objets de la mémoire. Pour une approche comparatiste des reliques et de leur culte » In: Revue belge de philologie et d'histoire, tome 85, fasc. 3-4, 2007pp. 941-942.
(8) Ces chiffres proviennent du site officiel www.dhammathai.org mais nous n’en avons pas trouvé pour les années suivantes.
(9) Louis Gabaude « La triple crise du bouddhisme en Thaïlande (1990-1996) ». In : Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 83, 1996. pp. 241-257.
(10) Nous ne critiquons pas cette façon de faire, il en est de même dans les églises catholiques en Thaïlande, pas de fausse modestie, dans ce pays, on préfère paraître qu’être.
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