Introduction.
Nous vous avons proposé « Notre histoire chronologique de la Thaïlande » en 245 articles et plus de 2500 pages ! Elle s’est écrite aux meilleures sources universitaires, savantes, érudites que nous avons pu trouver, même si parfois ces illustres auteurs avouaient qu’elles étaient partielles, fragmentaires, contradictoires. Nous avons quand même avec les modestes moyens qui sont les nôtres (Nous ne sommes pas historiens de profession) mené à bout ce projet, dont il faut convenir la rareté dans les blogs.
Ne voulant en rester là, nous avons décidé d’écrire « Un récit historique de la Thaïlande » en nous servant librement de ce que nous avons appris.
Il s’agit ici comme l’implique ce genre, de respecter la chronologie de cette histoire thaïlandaise, dans une fiction « réaliste » qui va rendre compte des faits historiques ou des légendes vécues comme « réelles » et des personnages ou des héros, témoins de leur époque. Ce récit s’imposera des articles courts (3,4 pages maximum), dans un style qui ne refusera pas différents points de vue, l’anecdote, des dialogues, l’humour, un ton léger parfois, dans sa volonté de se rendre accessible à un plus large public.
Un récit des origines des Thaïs.
Nous connaissons peu de choses sur l’origine des Thaïs. Les meilleurs spécialistes jusqu’au début du XXème siècle évoquent des fables, des légendes, des traditions populaires qui n’ont rien d’historiques, comme si même, comme le dit l’historien François Turpin, les Thaïs se faisaient un scrupule de déchirer les voiles mystérieux de leur origine.
Quelques généralités, de sources chinoises, évoquent au VIIème/VIIIème siècle, leur présence dans les vastes espaces du sud et du sud-ouest de la Chine, et qu’ils se distinguent par une langue commune, la culture du riz, leurs maisons sur pilotis, et une organisation sociale en muang, s’intégrant dans une hiérarchie politico-religieuse, dans un espace où des muang/villages sont composés d’une dizaine de familles sous l’autorité d’un chef, ou regroupés parfois sous l’égide d’une famille plus puissante, jusqu’à former quelques muang/principautés afin de mieux pouvoir assurer leur défense, dans une Chine où les raids et les guerres sont nombreux.
Mais on apprendra peu sur cette organisation pourtant essentielle pour comprendre la vie et la culture des Thaïs, ni d’ailleurs sur leur localisation et leur identification. Ce qui fait peu, vous l’avouerez.
Il faudra attendre le milieu du XIXème siècle et la nécessité de se défendre contre les menaces colonisatrices anglaise et française pour que les Thaïs commencent à écrire leur histoire, sans pour cela identifier leur origine. (Le roi Mongkut (1851-1868) croyait que les Thaïs provenaient des Indes, pour dire que la question des origines ne préoccupait pas trop les Thaïs)
Mais au début du XXème siècle des historiens thaïs et étrangers proposeront plusieurs versions parmi lesquelles on avancera l’idée que les Thaïs avaient formé le royaume de Nanzhao (ou Nan Chao) dans le Yunnan Chinois au VIIIème siècle. Cette thèse sera encore soutenue par certains historiens thaïs jusqu’en l’an 2000.
Mais depuis peu, certains chercheurs ont pu démontrer que les muang thaïs vivaient certes au sein du royaume de Nanzhao fondé en 737, mais dans un royaume fondé par l’unification de six zhao, composé de six tribus de Mengshe, Mengsui, Langqiong, Dengtan, Shilang, et de Yuexi, constituées essentiellement de deux ethnies de langue tibéto-birmane : les Bai et les Yis. Nous avions certes un repère, mais pas une origine.
De plus, nous étions toujours au niveau des généralités sans pouvoir dénombrer les principautés, nommés des chefs, pour évoquer « des » rapports commerciaux, et/ou « des » alliances et/ou « des » rapports de vassalité avec ce royaume (Quels étaient-ils ?) ; Qui les a conduit à participer à certaines de leurs guerres (Lesquelles ?) pour défendre le royaume contre les « ennemis » (tibétains, chinois, vietnamiens) ou à les attaquer ou à s’allier. Mais pour en savoir plus, il faudrait entrer dans l’histoire de ce pays jusqu’à sa chute en 902, puis celle de trois brèves dynasties et du royaume de Dali fondé en 937, pour ne rien apprendre de particulier sur les Thaïs. Nul héros thaï de cette période « chinoise » n’est connue.
Toutefois chaque bouleversement provoqua des migrations par vagues successives à partir du VIIIème siècle, effectuées dans des directions différentes pour s’installer dans le nord-est de la Birmanie, au Laos pour descendre jusqu’au bassin du Chao Phraya (Le nom Syam apparait pour la 1ère fois en 1050), dans les hautes terres du Nord-Vietnam, le Cambodge, et dans le nord-est de l’Inde.
Mais là encore, si émigrations successives il y a eues, nul ne peut dire leur nombre, leurs dates, ni pourquoi les Thaïs ont pris des chemins migratoires différents, si ce n’est que bien que partageant une même langue, des mythes communs, ils se partageaient en différents groupes avec des traits culturels et traditionnels spécifiques, distinguant ainsi les Thaïs, immigrant au Siam (Dont, les Thaïs Yuans du Nord), les Shans ou Thai Yai de Birmanie, les Zhuangs du Yunnan en Chine du Sud, les Thai Lue du Laos et de Chine, encore appelés Dai, les Nung de Chine, du Laos, de la Thaïlande et du Viêtnam, les Tai Dam ou « Thai Noirs » du Laos et du Viêt Nam, les Tai Daeng ou « Thai Rouges », les Tai krao ou « Tai Blancs » …
Mais comment ces différents groupes étaient-ils à l’époque chinoise du royaume de Nan Zhao, nul ne l’a dit. Et on ne peut même pas opérer des déductions, tant ils se sont transformés au fil des migrations, conquêtes, alliances, occupations, « greffage culturel » et « mélange » jusqu’à ce que leur langue même soit devenue quelque peu différente.
Pourquoi si peu d’informations historiques sur l’origine des Thaïs ?
On dit que l’histoire commence avec l’écriture. Or il faudra attendre la fin du XIIIème siècle pour voir apparaître l’écriture thaïe.
Ensuite, « les Chroniques royales » ou les « Annales siamoises », comme nous le verrons par la suite, écrites par les Thaïs qui étaient censées raconter les mérites des rois et leurs hauts faits, sont – comme l’ont rappelé de nombreux savants comme Monseigneur Pallegoix - sont truffées de fables et de légendes et présentent peu de faits historiques.
Mais peut-être tout simplement, que l’histoire – au sens occidental - n’a jamais intéressé les Thaïs jusqu’à la fin du XIXème siècle, car ils savaient que leur « vérité » était dans les mythes et que leur origine venait de Khum Borom, le concombre géant qui a poussé après l’inondation du monde à Muong-Thèng (Dien-Bien-Phu).
Ce sera notre prochain récit.
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Pour en savoir plus, Cf. Nos articles de 10 à 14 de « Notre Histoire de la Thaïlande » :
10. Origine des Thaïs ? Mais de quels Thaïs parlons-nous ?
12. Origine ou origine(s) des Thaïs ?
http://www.alainbernardenthailande.com/article-12-origine-ou-origine-s-des-thais-98281976.html
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cécile 09/12/2016 07:51
grande-et-petites-histoires-de-la-thailande.over-b 10/12/2016 00:45