Nous avions écrit dans notre Isan 7 :
« Le principal attrait de l’Isan est assurément les vestiges de la civilisation khmère. A partir du IXe siècle, l’empire khmer commence à s’étendre au-delà des frontières du Cambodge actuel. À son apogée, du XIe siècle au début du XIIIe, il englobe de vastes territoires aujourd’hui thaïlandais, dont, au nord-est, la vallée de la Mun et les provinces de Nakhon Ratchasima, Buri Ram, Surin et Ubon Ratchathani. Dans cette seule vallée, on estime que les Khmers ont construit plus de 300 temples, dont Phimai, qui était relié à Angkor, au sud, par une « voie royale » longue de 225 kilomètres. Aujourd’hui, les Prasat Hin Phimai, Prasat Hin Mueang Tam, Prasat Kamphaeng Yai et Preah Vihear - uniquement accessible depuis la Thaïlande, bien qu’appartenant techniquement au Cambodge - figurent parmi les plus beaux sanctuaires khmers au pays. Mais beaucoup de provinces possèdent des temples kmers »
En effet, l' Empire khmer a été le royaume dominant de cette Région du IX ème au XIIIème siècle. Il découle de la réunification des 2 royaumes khmers de TCHEN LA au début du IXème siècle par Jayavarman II( 802-850).
On ne va pas retracer toutes les péripéties et les conflits et les luttes de pouvoir qui s’achèvent avec Suryanavaran II (1113-1150),
mais noter que l’empire s’agrandit, à l’ouest en intégrant l’état Môn de Hariphunchai (aujourd’hui au centre de la Thaïlande) et certaines zones frontalières du royaume de Pagan, en vassalisant certaines « tribus » thaïes au Nord, en annexant à l’est plusieurs provinces du Champa, au sud jusqu’au royaume malais de Grahi (correspondant à peu près à l’actuelle province thaïlandaise de Nakhon Si Thammarat et enfin au nord en poussant jusqu’au sud du Laos.
C’est donc un vaste Empire qui va développer un vaste réseau routier, créer plus de 120 gites d'étape pour les marchands, les fonctionnaires et les voyageurs, construire une centaine d’ hôpitaux sur l’ensemble du territoire et bien sûr construire de multiples temples de tailles différentes selon l’importance des localités, comme ceux de Phimaï et de Phnom Penh.
Mais l’Empire n’empèchent pas les révoltes, et on verra les Chams mettrent à sac Angkor en 1177, les sujets thaïs se rebeller, chasser les khmers et fonder le premier Royaume de Sukkhotaï en 1238.
Le royaume Ayuthia, fondé en 1350 s'étend aux dépens de l'empire khmer, affaibli, et dont la décadence s'amorce. Les hostilités incessantes tournent à l'avantage des Siamois, qui s'emparent d'Angkor en 1431, la pillent et emmènent ses habitants en captivité. La prestigieuse capitale est abandonnée et en 1434, la cour s'installe aux « Quatre Bras », près du site de l'actuelle Phnom Penh.
La civilisation khmère a subi comme le royaume de Dväravati, l’influence culturelle indienne. Le bouddhisme s’est progressivement imposé à côté de l’adoration de Shiva et d’autres divinités hindouistes avec le culte du Dieu Roi. Durant cette période, beaucoup d’Indiens, lettrés, artistes et brahmanes furent invités à la cour d’Angkor et la littérature sanscrite soutenue par la royauté, y était florissante.
Tant qu’on reste dans ses généralités, on est en fait loin de l’Histoire, car nous dit Claude Jacques (Directeur d’études à l’EPHE (IVe section) Conseiller spécial pour Angkor auprès du directeur général de l’Unesco, 2000), l’Histoire fût mouvementée (les dix premières années du XIe siècle allaient être houleuses : deux rois se disputèrent le pouvoir suprême et la guerre fut dure à travers l'empire). l’Empire n’a pas toujours été unique, il y eut de nombreuses capitales et des guerres de religion ainsi par exemple :
La situation politique troublée du XIIIe siècle est la cause des hésitations des historiens. Le successeur de Jayavarman VII, bouddhiste lui aussi, continua son œuvre, mais à sa mort – naturelle ou provoquée ? – apparut un roi Jayavarman VIII qui venait d'une famille hindoue et qui bannit le bouddhisme avec une intolérance exceptionnelle au Cambodge : plusieurs dizaines de milliers de figures de Bouddha ont été bûchées, accompagnant certainement la destruction de beaucoup de statues.
Du bouddhisme à l'hindouisme…… et d'une capitale à l'autre
Angkor revint au bouddhisme dès l'avènement de son successeur, mais au bouddhisme du Theravâda, qui est resté la religion actuelle du Cambodge. Elle n'avait pas besoin de sanctuaires construits en pierre, se contentant de constructions en matériaux légers – surtout du bois – qui ont disparu au cours des siècles ; une fois de plus, on a cru à la disparition subite de l'ancienne civilisation : il n'en est rien et un bon nombre de faits viennent témoigner de la vitalité d'Angkor, sans doute jusqu'à la fin du XVIe siècle. Mais un autre royaume s'était installé dans le sud du Cambodge, et la division de l'Empire khmer n'a laissé aux rois d'Angkor qu'un domaine réduit.
À ce jour, les plus anciennes traces des origines de l’empire ont été découvertes sur le site du temple de Sdok Kok Thom, dans la province thaïlandaise de Sa Kéo. Une stèle, datée de 1053, énonce la chronologie des anciens souverains khmers, depuis l'accession au trône de Jayavarman II en 802, jusqu'à Udayädityavarman II (1050-1066).
On aimerait en savoir plus, apprendre leur mode de vie mais les spécialistes avouent bien souvent leur ignorance, tant ils sont « soumis » à l’interprétation des monuments religieux et leurs inscriptions lapidaires. De plus, nous dit encore Claude Jacques :
« tout le reste a disparu, habitations humaines, faites essentiellement de bois, et bibliothèques, brûlées ou dévorées par les termites ou autres insectes. C'est dire qu'il y a de nombreuses lacunes dans notre connaissance de cette civilisation ; en tout cas, les inscriptions ont permis de rétablir au moins un squelette d'histoire, ce qui donne une chronologie sinon toujours absolue, du moins relative des monuments».
« L'histoire du Cambodge du XVe au XIXe s. est celle des longues luttes qu'il doit soutenir contre ses deux puissants voisins, le Siam et l' Annam, auxquelles s'ajoute l'instabilité interne chronique. Le prince Ponhéa Yat, couronné en 1441, donne au pays une brève période de stabilité et de paix, avant d'abdiquer en 1467. Les rivalités intestines reprennent, avec parfois une intervention siamoise en faveur d'un prétendant au trône. Ang Chan (1516-1566) tente de contenir par les armes la pression des Siamois, qu'il bat près d'Angkor dans un lieu qui devient Siem Réap (« La défaite des Siamois »). Il transfère sa capitale à Lovêk. Ses successeurs se disputent à leur tour le pouvoir et ne parviennent pas à repousser une invasion siamoise, qui s'achève par la prise de Lovêk (1594). C'est vers le milieu du XVIe s. que les premiers Européens arrivent au Cambodge, missionnaires, commerçants et aventuriers, Espagnols ou Portugais ; une tentative de deux d'entre eux, Veloso et Ruiz, pour prendre le contrôle du royaume échouera en 1559 ».(Larousse)
Après la chute de Lovêk, le Cambodge est devenu le vassal du Siam. On peut penser que le prix fut encore payé par la captivité d’une grande partie de ses habitants, qui ont dû être contraints, pour une grande part, de s’installer en Isan. Mais de cela nous n’avons pas encore le récit.
Jeff de Pangkhan 01/06/2011 04:34